Monsieur BOCQUERY,
c'est avec un énorme plaisir que j'apprends que vous souhaitez que je vous retranscrive en intégralité tout le texte que je possède concernant mon père Robert HALEWYCK. Je me permets également de vous rajouter les éléments que je possède sur mon grand père Gaston HALEWYCK déporté également par le convoi du 27 janvier 1944 parti de Compiègne les emmenant sur Buchenwald.
mon père
Robert HALEWYCK 1924-1987
voici ce texte:
"Joyeux anniversaire"! repris en choeur, des bougies allumées, un gâteau sur la table, la présence chaleureuse d'une famille réunie. Que rêver de plus quand on fête ses 20 ans?...Et puis, d'un seul coup, comme un mirage qui se dissipe, l'image disparait, et ne restent plus que le froid, les toux rauquent des camarades.
Camp de concentration de BUCHENWALD, le 25 Janvier 1944, Robert (Bob) a 20 ans et ne les fête pas.Dans le baraquement bondé de corps affaiblis, sales et malades, tous s'éteignent à petit feu.Chacun s'accroche comme il peut, espérant ne pas faire partie de la prochaine exécution sommaire, du prochain jeu sadique des "Kapos". Un jour de gagné, un jour de plus à lutter contre le désespoir et l'horreur quotidienne. Son compagnon de châlit, atteint du typhus, râle et la fièvre le consume peu à peu, Paris parait si loin.....
Né à PARIS le 25 janvier 1924 dans une famille bourgeoise, il est le cadet de trois enfants, il a 15 ans en 1939 et tout lui réussit: études, sports, etc...mais, car il y a un mais, la France est en guerre, la drôle de guerre. Les Allemands ont envahi PARIS, et une partie de la France, et, tout comme beaucoup de Français, il a du mal à accepter.
Quand il découvre que son père, Gaston HALEWYCK, ancien combattant de la guerre 14-18 et ses deux soeurs, plus agées, font parties d'un réseau de résistance, il n'aura de cesse d'y être intégré.Il réussit à se faire admettre malgré son jeune age, dans les rangs des Forces Françaises Combattantes en avril 1942.
En juin 1942, il avait quitté l'école Chauvot, située 14 rue Louis David à PARIS 16 ème, alors qu'il se trouvait en classe de philosophie pour rejoindre son poste dans le réseau de la résistance. Il reprendra ses études au lycée Janson de Sailly et obtiendra son baccalauréat avec les félicitations du jury.
Dès lors, avec l'inconscience de ses dix huit ans, il met toute son énergie au service de la résistance. Mais en mesure t-il les dangers?
Le principal réseau de résistance est celui dit "Jean-Marie Buckmaster", du nom du colonel Maurice J. Buckmaster qui créa ces réseaux dépendants du S.O.E. Service Operations Executive, issu du ministère de la guerre économique créé par Winston Churchill en 1940. Les principales missions de ces réseaux étaient de mettre feu à l'Europe, en tissant des liens avec les groupes de résistants qui se constituent, avec pour objectifs : renseignement, sabotages, évasions de pilotes, réception et stockage des armes parachutées.
Il participe à toutes les opérations que lui confient ses chefs: toujours prêt, il se donne à fond dans ses missions. En avril 1943, il est rattaché comme agent de sabotage du réseau "Jean Marie BUCKMASTER" sous le contrôle de l'intelligence service. son pseudonyme sera: GUICHARD Joseph. Chef d'un réseau important, a donné un magnifique exemple de courage, de sang froid et d'organisation. Commande et participe pendant l'occupation à de périlleuses attaques contre des postes allemands. Avec ses hommes, prend par surprise un poste de repérage contre parachutistes (forêt de Rambouillet), sabotage et déraillement sur la ligne PARIS-GRANVILLE, (pont de Maulette novembre 1943), engagement avec une section d'infanterie allemande (8 allemands tués) blessé lui même, réussit à rejoindre son P.C avec tous ses hommes, novembre 1943. Les interventions se multiplient, les dangers aussi. (engagement sévère dans la forêt de l'Isle Adam, prise de deux camions ennemis en avril 1944). L'étau commence à se resserrer autour de l'équipe, certains camarades sont tués, d'autres blessés, le danger vient également des trahisons.
Bob participe très activement aux deux attentats de déraillement du train sur la ligne Paris-Granville au niveau de Maulette, en virage et en tranchée,
à côté du pont de la route qui va vers Mantes.
Il s’agissait non de trains de civils, mais de trains militaires. Philippe OZOUF (neveu de Pierre BROSSOLETTE et beau frère de Robert) et Bob étaient ceux qui manipulaient les charges de plastique et étaient déjà très avertis de comment manipuler cela. Il fallait que ça saute quand la locomotive était passée, pour si possible sauver le chauffeur et le mécanicien, qui étaient des français. Les attentats avaient lieu la nuit. Il était interdit de circuler après 8h ou 9h du soir.
Ces trains transportaient du matériel allemand. Cela causait 24 à 48h d’arrêt de la circulation sur la voie.
Les Halewyck sont arrêtés tous par l’équipe de Mazuy, 37 rue Vital, pour Geneviève, Christiane et Colette, non sans avoir fait disparaître en quelques
minutes tous les documents compromettants (adresses, journal, etc…), alors que les allemands sont encore à la porte. Gaston est arrêté au travail, Bob, au collège. Mazuis avait ses quartiers généraux avenue Henri Martin. Au bout de deux jours, Bob s’évade en forçant le placard dans lequel il est enfermé, en chaussettes, avec un pantalon sans ceinture. Personne de la famille ne le revoit. Il tente de passer en Espagne (il n’y a plus de zone). Son passage a été identifié dans les prisons du midi, desquelles il s’évade systématiquement. Il finit à la prison centrale de Bordeaux, lieu d’où on ne s’évade pas. De là, il est transféré dans un camp à Compiègne où son père se trouvait (par hasard ?) depuis quelques jours. Il promet de se laisser déporter avec son père, et probablement, se fait connaître avec sa véritable identité, ce qui fait qu’ils sont déportés ensemble en Allemagne, à Buchenwald, puis plus tard de Buchenwald à Dora. Dans le train de déportés, des prisonniers s’évadent, mais Gaston n’ose pas tenter l’évasion et Bob tient alors à rester avec son père. Ils resteront déportés un an jusqu’à la libération. Gaston mourra au moment de la libération.
Arrêté sur dénonciation le 25 novembre 1943, torturé par BARDET et la fameuse baignoire, condamné à mort, évadé et repris 8 fois, il sera déporté à DORA le 27 janvier 1944, arrivé le 29 janvier 1944, avec 1412 français, numéro de convoi I 173 sous le matricule 44177 en Allemagne ainsi que son père, puis à BUCHENWALD, DACHAU. L'un des camps les plus affreux.
* Interné à ABWEHR PARIS, BIARRITZ MONT DE MARSAN
* Déporté à BUCHENWALD, DORA (matricule 44177)
* Inscrit sur la liste des prisonniers devant être tranférés du camp de concentration de BUCHENWALD à DORA, en compagnie de son père Gaston. Ce dernier avait le matricule 44176. Ils étaient inscrit sur cette liste comme mécanicien.
* S'évadera, malgré ses blessures, et rejoindra les Forces russes, dans les rangs desquelles il a participé à la lutte, où il terminera la guerre, et, surprise, le jour de l'armistice, il est arrêté par les mêmes russes dont il partageait hier, les combats. Les russes veulent en effet, à cette période, emmener chez eux tous les spécialistes ayant travaillés à la fabrication des fusées V2 en Allemagne, ce qui était son cas à DORA. Il s'évade à l'arrivée en Russie et rentre à pieds en Allemagne de l'ouest, où il trouve les Forces américaines. Il rentre à PARIS le 23 mai 1945, pesant 30 kilos, sa santé définitivement compromise, mais toujours persuadé qu'il avait fait son devoir. Nommé Chevalier puis Officier de la Légion d'Honneur par le Général de Gaulle, il obtint toutes les décorations que ses chefs avaient demandées pour lui.
Suite à cette guerre, lui et plusieurs de ses hommes se retrouveront au procès de l'ABWEHR, où il retrouvera BARDET, celui qui l'avait dénoncé. Les rescapés de "la baignoire" accableront BARDET.
Quant à Hugo BLEICHER, Mathilde CARRE, nous connaissons leurs sorts.
DECORATIONS:
* Chevalier dans l'Ordre de la Légion d'Honneur
* Officier dans l'Ordre de la Légion d'Honneur
* Médaille de la Résistance
* Médaille des déportés de la Résistance
* Médaille des évadés
* Médailles des blessés
* Médaille de la France Libérée
* Médaille association Franco-Anglaise pour officier
* Citation à l'ordre du régiment
* Croix de guerre avec étoile de bronze
* Croix du combattant
* Croix du combattant volontaire
* Croix du combattant volontaire de la résistance
- Lieutenant des forces armées
* Parle lit et écrit couramment Français, Anglais, Italien.
* Parle Allemand, Suédois, Espagnol
* Bonne notion de Russe
* Invalide à 100%
Mère et soeurs capturées et torturées par la gestapo
Père mort pour la France en 1945
La mention" Mort pour la France" lui sera attribué en octobre 2005. Son fils Bertrand HALEWYCK ayant voulu honorer sa mémoire, avait monté un dossier des plus complets, et l'étude de son dossier par les plus hautes administrations, a fait apparaitre que les circonstances dans lesquelles il etait décédé, (des suites de ses blessures de guerres et des infirmités toutes contractées en déportation) sont conformes aux dispositions de l'article L486-alinéa 8, du code des pensions d'invalidité.
il est inscrit sur le monuments aux morts de Meyzieu (69),
ainsi que sur le site internet de GENWEB.
il est également inscrit avec son père sur
LIVRE-MEMORIAL
des déportés de France
arrêtés par mesure de répression
et dans certains cas par mesure de persécution
1940-1945
mon grand père
Gaston HALEWYCK 1895-1945
1914/1918:
Mobilisé comme soldat de 2ème classe dans l'armée Belge
Soldat motocycliste au 10ème bataillon génie, 1ère Cie;
Matricule 194/7862
Il a reçu les distinctions honorifiques suivantes:
* cité à l'ordre du jour de l'armée du 14/03/1921, arrêté royal du 27/10/1921.
* croix de guerre 1914/1918 par A.R 1175 du 27/10/1921 :"s'est évadé de Belgique envahie pour servir la cause de l'honneur de la liberté".
*Médaille du combattant volontaire par A.R 2804 du 15/11/1939
*Médaille commémorative 1914/1918.
A obtenu 7 chevrons de front.
il avait été incarcéré à FRESNES, COMPIEGNE, BUCHENWALD, DORA et RAVENSBRUCK;
Chevalier de l'Ordre Léopold avec palme et croix de guerre 40 avec palme (posthume) par arrêté 5598 du 07/12/1948 avec la citation ci-après: "Se mit sans réserve à la disposition d'un service de renseignements et d'action (S.R.A) et réalisa à l'entière satisfaction de ses chefs les missions dangereuses dont il fut chargé.
Arrêté en raison de son activité patriotique, et déporté en Allemagne, il mourut à Ravensbrück, le 16 avril 1945, trop fatigué d'un exode de 10 jours sans ravitaillement.
Il meurt, victime de son devoir.
grades:
auxiliaire 1ère classe en date du 01/04/1942 Ar n°1417
adjudant en date du 01/04/1943 Ar n°1272 bis
lieutenant en date du 25/11/1943 Ar n°5098
*Médaille de la Résistance (posthume)
*Médaille de la Résistance Française
*Médaille commémorative 40/45 (posthume) par arrêté n°5598 du 07/12/1948.
*Médaille de la Légion d'Honneur
Il a été promu Lieutenant puis Capitaine.
Une attestation sur l'honneur faite par PILVEN Pol est retranscrite comme suit:
"je soussigné PILVEN Pol. attaché au cabinet du secrétaire d'état à la Présidence du Conseil, domicilié 11 rue ch.desvergnes à Bellevue, certifie que l'attitude de HALEWYCK Gaston fût irréprochable pendant sa captivité dans les camps de DORA et RAVENSBRUCK. J'ai connu HALEWYCK Gaston au camp de concentration de DORA pendant l'hiver 1944-45 et j'ai été son compagnon jusqu'a sa mort survenue à RAVENSBRUCK au mois d'avril 1945.HALEWYCK était unanimement considéré comme un excellent camarade".
(fin de citation)
Veuillez agréer, Monsieur BOCQUERY, l'expression de mes sentiments les meilleurs
Bertrand HALEWYCK
....